"… Les livres sont muets, ils parlent, Et ils sont muets, c'est là le miracle…"

Elias Canetti, Auto-da-fé, traduction de l'allemand par Paule Arhex, Paris, Gallimard, collection l'Imaginaire, 1991, page 537 et page 424 dans la première édition en langue française parue en 1949 aux éditions Arthaud sous le titre LA TOUR DE BABEL.

Les livres de François Righi sont faits de livres, sont l’incarnation sensible, plastique, d’une lecture. Ils sont sa trace vive, l’écho d’une jubilation saisi par la matière du livre, et l’aveu aussi de l’insu de cette jubilation qu’il ne peut suffire de dire, ni même d’écrire, à laquelle il faut plus et autre que les mots pour se traduire, se laisser appréhender. Ces livres sont le fruit d’un effort vers l’insaisissable qui fait naître l’émotion et le trouble, qui provoque le mouvement vers le livre parce qu’il faut, pour ne pas tout à fait les perdre, les inscrire dans la matière, celle d’un autre livre, comme pour en prendre la mesure, s’assurer de leur réalité en la livrant au monde, à la chair et au soleil du monde, aux regards.
Nul étonnement alors à ce que le miroir, ses jeux, habite de mille manières ces livres-là.
Les livres sont notre commun partage, mais qui peut dire pourtant ce que les autres ont lu ? Un peu de ce mystère affleure dans ces livres.
L’aveu d’une émotion si singulière ne saurait être trop obvie, sauf à la trahir. Ce qui est offert n’est pas pour autant donné. Les pages qu’il faudra tourner sont autant de voiles qu’il faudra lever.

Marie-Jeanne Boistard, conservateur à la bibliothèque de Blois.